Contrer le pouvoir des entreprises #numériques, c’est en quelque sorte, reprendre le pouvoir de nos démocraties. Voilà la question que posait ATTAC.

Je suis allée avec Christian L’Écuyer, trésorier à Connexion-U, hier à cette journée de réflexion sur le sujet. Derrière nous, Alain Saulnier, ex-directeur de l’information à Radio-Canada, qui en avait long à dire sur la « barbarie numérique » des GAFAM appelé aujourd’hui MAAMA ! C’est la mamelle à laquelle nous nous abreuvons dorénavant.

Voici un compte rendu des panélistes.

Mais d’abord je dois penser à remplacer GAFAM par MAAMA.

Jonathan Durant Folcault (innovation sociale)

Il nous parle de capitalisme algorithmique, comme la nouvelle forme du pouvoir ! Disons que aujourd’hui, le capital ne s’accumule plus en vendant du pétrole, mais des données.

La DATAFICATION de la société amène l’automatisation du capitalisme au service de machines industrielles. Ce qui concentre le pouvoir dans les mains du MAAMA.

D’où vient leur pouvoir ?
• De l’accaparement des réseaux de neurones de l’intelligence artificielle de la société. En d’autres mots, chaque photo de vous, chaque mot permet à l’IA d’approfondir ses apprentissages, de raffiner les informations sur vous. Ce qui produit un attrait irrésistible pour les annonceurs qui cherchent leur client cible. MAAMA accapare 80% des revenus de publicité !!!
• Ces géants numériques sont difficiles à encadrer à travers le processus démocratique, il est donc difficile d’agit contre leurs intérêts.
• La gouvernance algorithmique, le fait de réguler, d’induire, de prédire fait que les géants accumulent un bien précieux : votre comportement qu’ils stockent dans un infonuage. Ce qui accroit leur capital algorithmique.
• Ce pouvoir algorithmique est impossible à arrêter car il est généré par l’IA. Nous contribuons tous à créer un monstre. Donc chacun de nous est responsable de la perte de nos pouvoirs démocratiques.
• Les biais de l’IA, la censure, les manipulations, peuvent générer un système d’opression, une dictature algorithmique, un crédit social à la chinoise.

PISTE DE SOLUTION : BRISER LE MONOPOLE NUMÉRIQUE – NATIONALISER

Maxime Ouellet, professeur à l’UQAM

Il nous parle de l’impact des entreprises numériques sur les individus et la société.

Il insiste sur le fait que les dirigeants des MAAMA sont nés dans le courant de Margaret Tachter, promotrice libertarienne pour qui la société n’existe pas. Seul l’individu est quantifiable et donc a une valeur.

L’un des biais de ces libertariens est de faire croire que le socialisme est dangereux donc qu’il ne faut pas laisser notre pouvoir aux gouvernements – redistributeur de richesse – alors que la privatisation serait salvatrice et bienveillante

Avec les libertariens 2.0, nous brisons le néolibéralisme associé à la propriété. Nous passons de la gouvernance par l’état, à la gouvernance par l’algorithme. L’état est nettement trop dépassé pour gérer des algorithmes, alors il signe un contrat avec les MAAMA (Saviez-vous que VOTRE identité numérique créée par le gouvernement sera stocké dans le nuage d’Amazon ???).

Donc il n’y a plus de société ni de travailleurs, que des individus entrepreneurs (C’est bien ce sur quoi a misé FACEBOOK MÉTA, en formant des tonnes d’individus pour nous enseigner comment faire du marketing en ligne et vendre nos services. Nous sommes dépendants).

Nous ne cumulons plus de capital du marché mais nous quantifions l’ensemble des qualités humaines sur quoi repose le marché (sentiments, croyances, etc). Un vent qui #leurre quoi 😉

Le marché produit des rentiers qui jouissent d’un revenu passif automatisé par l’IA. Ce revenu est basé sur la quantification des comportements humains qui a une valeur sur le marché.

L’inconscience des humains rend ce marché d’autant plus prometteur, sur la base d’enchères publicitaires.

Au lieu d’adapter l’IA à nos besoins, nous adaptons nos comportements au service de « barbares numériques ».

SOLUTION : POUR AGIR EN COHÉRENCE, IL FAUT CONNAITRE LA CAUSE (les fondamentaux) AU LIEU DE CUMULER DES DONNÉES ET DE PRÉVOIR.

Samuel-Elie Iris abord la question des paradis fiscaux de ces géants.

Il explique à quel point c’est difficile de taxer les géants, car ils n’ont pas de lieu de travail précis, ils sont partout et nulle part. De plus, l’Irlande leur a offert un cadre très avantageux et protecteur qui a forcé les autres pays à s’y conformer afin de profiter des avantages de l’économie numérique.

Les paradis fiscaux ont permis aux géants de mettre en place leur modèle économique et de l’imposer. Avec ce modèle, les lois des pays ne peuvent les encadrer. En tout cas, il reste peu de temps. S’ajoute à ce fait accompli, un vide juridique.

SOLUTIONS :
• Projet de loi C-11
• Projet de loi C-18
• Taxer Netflix et serveurs numériques
• Tracer à qui appartient l’activité de la valeur (richesse), où elle aboutit afin de créer un registre mondial.
• Récupérer l’argent par une taxe unitaire sur le revenu global directement au siège social (plancher d’impôt).
• Barrer l’accès aux contrats publics (tel Amazon qui stockera votre identité numérique créée par l’Assemblée nationale).

Nicole Paul nous a parlé de l’impact du numérique sur l’environnement.

J’ai été bien surprise de savoir que le plus grand polleur n’étaient pas les fermes numériques.
Ce qui cause le plus de pollution – et tout le monde est concerné par ça – c’est le nombre d’appareils fabriqués. Et l’internet des objets, vanté par les télécommunications pour nous faire avaler la 5G, produiront encore plus de cette pollution !

Il faut 2 k de consommation d’eau douce pour fabriquer une seul ordinateur.
Les technologies ne sont pas moins polluantes que le pétrole:
• 3,8% de gaz effet de serre (le double de l’essence)
• 600k de matière première
• 20 000 litre d’eau
• 200k d’énergies fossiles (eh oui ! )

SOLUTIONS :
• Le recyclage est très complexe. Alors mieux vaut miser sur la sobriété donc conscientiser le consommateur.
• Politiques : législation, règle de protection de données personnelles, lois cadres sur l’obsolescence, etc.

Alain Saulnier parle de culture

Il en avait long à dire sur l’hégémonie culturelle de ces «barbares numériques», titre d’un de ses livres. Il insiste sur leur personnalité. Leur image est cool et donne un coup de jeune à tous ceux qui s’y frottent, incluant nos gouvernements : « Les dirigeants politiques sont subjugués » devant ces « propriétaires de l’univers numérique » !

Comment allons-nous pouvoir résister contre MAAMA ?

RÉPONSE : Nous devons démontrer la grandeur de notre culture, nous avons le devoir de partager cette richesse avec les immigrants.

SOLUTION :
Saulnier évoque le fait que le français a été annulé du monde. Et qu’on ne protège pas la langue des cultures autres que l’anglais. Nous devons valoriser toutes les langues de la terre pour BRISER L’HÉGÉMONIE LINGUISTIQUE ANGLOSAXONNE.

Il nous présente un tableau éloquent des langues utilisées sur le web:
• Anglais : 63,70%
• Chinois : 19,4%
• Russe : 6,8% (sans doute pour des raisons d’espionnage hihi)
• Français : 2,5%

Anne-Sophie Tellier, spécialiste en droit humain, culturels et économiques

Elle nous parle du modèle très lucratif des géants dans l’espace publicitaire. Le pouvoir informationnel repose sur la collecte de données personnelles qui monétise NOTRE expérience humaine. Chaque donnée sur vous crée un profil global pour publicité. Faramineux profits pour lesquels VOUS travaillez.

JE N’AI RIEN À CACHER ! VRAIMENT ?

C’est la phrase la plus souvent exprimée lorsqu’on vous parle de vos données privées. Selon Anne-Sophie, en disant ça, vous minimiser les enjeux de la DATAFICATION, le pouvoir de collecte de données DÉTENU PAR MAAMA et qui saborde nos démocraties.

Les données privées sont plus collectives qu’on pense.

Letellier nous invite donc à revoir notre compréhension des données personnelles et propose plutôt cette phrase :

QUE VOULEZ-VOUS MONTRER ?

Les données personnelles ne devraient pas être perçues uniquement comme choix individuel, mais l’envisager comme notre relation à la qualité de l’air : Un bien public dont l’impact individuel est global et ne peut être lié à la «sagesse» ni surtout à l’ignorance de millions de personnes.

Pour résister contre le MAAMA, elle propose plusieurs pistes :
• Dégoogliser internet
• Utiliser moins de services de MAAMA (hébergements alternatifs, transparents, solidaires, neutres)
• Minimiser les objets connectés
• Faire le ménage du cellulaire pour enlever les applications inutiles (énergivore)
• Demandez à votre entourage la permission d’utiliser leur image.

L’aspect du consentement est au coeur des pratiques individuelles. Une réforme législative et institutionnelle devrait :
• Briser les monopoles anti-trust
• Créer une approche contractuelle pour la protection des données privées.
• Créer un mécanisme de sécurité pour éviter que la dépendance au numérique et l’engagement ne génère des algorithmes influençant négativement les comportements (surtout chez les jeunes).

Comme vous voyez, nous sommes au milieu d’une tempête de sable. Ça ne tue pas, mais ça aveugle le regard individuel et ça brouille la vision collective.

Je vous invite à la vigilence. Et aussi à soutenir Connexion-U (https://connexion-u.org/campagne-de-sociofinancement/), OBNL dont la mission est la protection de l’être humain et de la démocratie dans l’économie numérique. Nous allons bientôt avoir besoin de vous pour produire un Guide de recommandations et une application de solidarité consciente

Vous pouvez aussi signer la Déclaration sur l’être essentiel : https://connexion-u.org/declarationsurletreessentiel/

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